Église Saint-Germain-des-Prés
Élevée à l’origine pour abriter les reliques de Saint-Vincent, cette église est d’abord consacrée sous le double vocable de Sainte-Croix et Saint-Vincent en 558. C’est son fondateur Germain d’Autun évêque de Paris en 555 et protégé de Childebert Ier — fils de Clovis et roi des Francs — qui donne son premier rayonnement à l’abbaye en obtenant à la fois le « fisc d’Issy », une exemption qui la soumet directement au pape, et le statut de nécropole royale des rois mérovingiens jusqu’à l’édification de Saint-Denis par le roi Dagobert. Après la mort de Germain en 576, son culte se développe et des miracles se produisent. C’est le 2 juillet 754 lors du transfert de sa sépulture dans la partie orientale de l’église, en présence de Pépin le Bref et de son fils Charles — pas encore Charlemagne, que l’abbaye sera définitivement consacrée sous le nom de Saint-Germain-des-prés.
Après sa destruction par les Normands, elle sera reconstruite entre 990 et 1014 par l’abbé Morard qui donne les formes actuelles à la tour, la nef et le transept de l’église d’aujourd’hui et le style roman des chapiteaux. 150 ans plus tard, l’augmentation du nombre de moines desservant l’abbaye amène à la construction du chœur en style gothique, avec l’adjonction d’un triforium utilisant des colonnettes de marbre de la première église Saint-Vincent. Entre 1644 et 1646 la nef, les bas-côtés et le transept sont voutés d’ogives dans le style gothique primitif du Chœur des Moines et les transepts nord et sud ouverts de larges baies au détriment des vitraux.
À la Révolution, l’abbaye est fermée, ses bâtiments vendus et le dernier supérieur de la congrégation, le bienheureux Ambroise Chevreux (1708-1792) massacré à la prison des Carmes le 2 septembre 1792. En 1793 le réfectoire sert d’entrepôt de poudre et le soir du 19 août 1794, une explosion suivie d’un incendie détruit la majeure partie de l’abbaye n’épargnant que le palais abbatial et l’église devenue raffinerie de salpêtre en février 1794. En 1802, les dégâts occasionnés semblaient avoir condamné définitivement cette église qui fut malgré tout rendue au culte en 1803.
Les sauvegardes du XIXème
Entre 1821 et 1823, une première restauration est entreprise par Étienne-Hippolyte Godde (1781-1869) qui fait déposer la plupart des chapiteaux romans de la nef au musée de Cluny pour les remplacer par des copies ; de même qu’il fait démolir les deux tours latérales aux angles du chœur trop fragilisées.
C’est lors de la seconde campagne de restauration entreprise de 1842 à 1861 sous l’égide de Victor Baltard (1805-1874) que l’église s’orne de fresques et de tableaux. Hippolyte Flandrin, aidé de son frère Paul et de deux élèves : Louis Lamothe et Joseph Pagnon, réalisa cet ensemble de peintures murales figuratives et ornementales, exceptionnel par son unité, son ampleur et les techniques novatrices de peinture à la cire mises en œuvre. Il réalisa successivement les deux grands tableaux du sanctuaire, le chœur des Moines et la nef. Alors que pour le sanctuaire, Flandrin s’était inspiré du XVIe siècle romain, pour le chœur il préféra le style byzantin qu’il avait pu admirer à la basilique Saint-Marc de Venise. Il a peint à droite et à gauche les douze apôtres, au fond du chœur les symboles des évangélistes entourant l’agneau ainsi que, dans les écoinçons des verrières des côtés, des anges aux bras et aux ailes écartés et tenant couronnes.
On notera que les dessins des cinq vitraux — dus à la maison Gérente — qui représentent les figures du Christ, de la Vierge, de Saint-Jean-Baptiste, de Sainte-Geneviève et de Saint-Germain, sont de la main de Flandrin. Un seul carton à grandeur nature (celui pour Sainte-Geneviève) est conservé au dépôt d’Ivry de la Ville de Paris et fut présenté à l’exposition Flandrin.
Signe du renouveau de la peinture murale au XIXe siècle, en 1862, du vivant d’Hippolyte Flandrin, ce décor fut classé Monument Historique et est toujours considéré comme son chef-d’œuvre. Dans le prolongement du Chœur des Moines, la croisée du transept et la nef se caractérisent également par la voûte étoilée aux couleurs vives peinte par Alexandre Denuelle qui est aussi l’auteur des motifs décoratifs des colonnes.
À la mort d’Hippolyte, la commande pour le transept fut adressée à d’autres artistes qui optèrent pour la toile marouflée réalisée en atelier puis collée sur le mur. On fit appel pour le bras sud à Sébastien-Melchior Cornu (1804-1870) lui aussi originaire de Lyon et élève d’Ingres ; et pour le bras nord à Alexandre Hesse (1806-1879) qui mourut avant d’avoir pu achever ses toiles, lesquelles ne seront jamais posées (d’où les grandes zones vierges laissées sans décor). Dans l’église, Victor Baltard réalisa l’émouvant monument commémoratif dédié à son ami Hippolyte Flandrin. Inauguré le 8 juillet 1866, le monument est en marbre blanc et noir. Il forme un portique de style sévère, ornementé de façon très pure et très simple avec au centre : le buste de Flandrin, qui est d’une ressemblance frappante.
Sources documentaires : Jacques Hillairet : Dictionnaire historique des rues de Paris ; éditions de Minuit 1963. Wikipédia. Visites guidées les mardis après-midi à 15 h, hors vacances scolaires.