Un an avant l’arrivée du Covid, au printemps 2019, rue du Croissant, un graffeur donnait vie à une passionaria d’un monde sous pandémie. Boulevard de Strasbourg. Magasins fermés, rideaux de fer baissés. « Les frontières tuent plus que le Corona ». A la caisse un film plastique est tendu pour isoler l'encaissement. Un panneau imprimé à la hâte, invite à privilégier les paiements par carte de crédit sans contact. Boulangerie avec film plastique de séparation entre les clients et les vendeurs. Pharmacie avec barrière de distanciation marquées au sol. Couche de sans domicile fixe, pas de balayage des rues. Canal Saint-Martin, les toilettes publiques ouvertes 24h/24 sont fermées …jusqu’à ce que les associations d’aide aux SDF s’en émeuvent. Canal Saint-Martin, rue de Lancry. « Qui soignera vos enfants demain ? » « Gels hydroalcooliques disponibles. Gants disponibles. Pas de masque ». « Prévention Covid 19, accès interdit. Par mesure de prévention, veuillez ne pas dépasser cette limite » …au delà une lumière éblouissante. Boulevard de l’hôpital, face à la sortie de l'hôpital de la Pitié Salpêtrière : « Merci ». Rue Réaumur, entre solidarité et revendication les messages sont clairs mais rares ; le soir, les applaudissements de soutien sont plus spectaculaires. Avenue Franklin Delano Roosevelt. Messages de solidarité. Rue Lafayette, square Montholon. « Prenons soin des soignants ! Soutenons-les. ». Faubourg Saint-Martin. « Coronavirus : maîtrisez les bons gestes pour limiter la propagation ». Boulevard Saint-Michel. « Restez chez vous ! » Place Saint-Michel, café fermé, chantier de Notre-Dame arrêté. Boulevard des Capucines. « L'Olympia et le Crédit mutuel vous donnent le la. Pour revenir plus vite, restez chez vous ». Boulevard Haussmann, grands magasins et Galeries Lafayette fermés. Rue de l'Echelle. Depuis le confinement les cafés et les restaurants sont fermés ; certains, acculés, essaient de maintenir un peu d'activité en proposant des ventes à emporter. Rue Saint-Honoré. En vitrine un mannequin reste spectateur du vide. Avenue de l’Opéra. Vitrines obturées, lumières éteintes, journée ensoleillée. Petit espoir, ce jour là il n'y a eu « que » 242 décès, un des plus faibles bilans depuis un mois. Rue Saint-Honoré. Aucune voiture en stationnement, vitrines vides, reflets déformés dans les vitres, un décor presque abstrait… Rue Saint-Honoré. Magasins fermés et obturés laissent juste un espace d'identification pour les plus prévoyants. Rue Saint-Honoré. Bien que les magasins soient fermés l'espace vacant permet encore la publicité. Rue de Castiglione. Magasins fermés, vitrines obturées. Place Vendôme, les magasins sont fermés et les vitrines sont vides. Comme tous les parcs et jardins celui du Luxembourg est fermé «… jusqu'à nouvel ordre ». C'est curieux comme cette martiale injonction résonne dans ces circonstances. Champs de Mars. « Attention : accès interdit… ». Pourtant la lumière était belle. Le lendemain sera la journée où l’on dénombrera le plus grand nombre de morts : 1438 en une journée. Pont neuf, accès aux berges fermés. « Attention : Accès interdit. » Jardins du Carrousel. « Information Coronavirus. Pour se protéger et protéger les autres, pique-nique et jeux sont interdits sur la pelouse ». Confinement jardins du Carrousel : « La petite nuit ». « Désinfection nettoyage du bus. Le poste de conduite et l'espace voyageurs de ce bus viennent d'être désinfectés dans la nuit du 21 au 22 avril ». Gare Saint-Lazare. Cour de Rome, les rubans interdisent de s'assoir. Gare Saint-Lazare. Cour de Rome, canalisation et repérage des distances de sécurité. Gare Saint-Lazare. Les rubans de canalisation imposent une circulation où les entrants ne peuvent croiser les sortants. Gare du Nord. Aucun train ne circule. Une des rares occasions de voire les quais vides… avec les marques de distanciation déjà imprimées. Gare de l’Est. Entrée en façade fermée. Gare de l’Est. Marqueurs de distanciation pour l'achat des billets. Gare de l’Est. Marqueurs de distanciation pour l'accès aux quais et consignes de sécurité affichées aux écrans.
Sous le règne de Covid19
Qui aurait cru l’année dernière qu’en ce début mai plus de la moitié de la population de la planète obéirait à des règles de confinement si strictes que notre genre de vie s’en trouverait changé de façon aussi radicale ? Covid 19 trouve son origine en Chine dans des circonstances encore floues où une chauve-souris et un pangolin auraient eu une part active. La date de naissance de la pandémie reste discutée, le 16 décembre dernier une femme est hospitalisée à Wuhan pour une pneumonie et les examens concluent à un virus de la famille du SRAS. Mais des experts pensent après relecture de cas antérieurs et inexpliqués ; que la pandémie pourrait être apparue entre août et novembre dernier… Covid 19 n’a pas non plus de portrait officiel, seules quelques représentations d’artistes, selon la formule consacrée, essaient de lui donner une forme. Une seule certitude : selon l’Académie Française, Covid 19 est du genre féminin. La Covid est l’acronyme de Corona virus disease ce qui se traduit par maladie provoquée par le corona virus et donc s’accorde à maladie.
Au delà de cette généalogie pour le moins floue, la pandémie de la Covid 19 nous renvoie à l’imaginaire des épidémies du moyen-âge. Non pas en raison de taux de mortalité dévastateurs mais de l’ignorance dans laquelle se trouvaient les sociétés d’alors dans le traitement de la maladie, de sa prévention ou de son origine. Évidemment les échelles de valeurs, de temps, de connaissance ne sont pas les mêmes mais en fait que sait-on de cette pandémie en dehors du fait, qu’un peu comme la grippe ou la bronchite, elle se propage par les postillons et le touché. Les personnes contaminées ne développant pas encore les symptômes pourraient transmettre la maladie… et selon la personne affectée par la Covid les conséquences varient entre un mal de gorge, un peu de fièvre et des courbatures ou un passage aux urgences pouvant nécessiter une intubation ou une mise en coma artificiel. Sollicités par les médias les spécialistes se sont succédés, sommés de bien vouloir nous éclairer. Au bout du compte, confrontés à la réalité, les contradictions de leurs conclusions ont conforté le sentiment que nous ne savions que peu de chose, et que la solution n’était pas connue.
Le 25 février la revue scientifique Science conclut que l’isolement du virus étant devenu impossible la pandémie est inévitable… Seule solution : confiner la population. La décision est annoncée le lendemain du premier tour des élections municipales et entre en vigueur le 17 mars à 12h. Dans le but de réduire les mouvements de population seuls les déplacements pour aller travailler et faire ses courses sont autorisés avec quelques dérogations pour des cas d’urgence familiale ou de garde d’enfant. Les entreprises et magasins « non essentiels à la vie de la nation » sont eux aussi fermés… Mais à quoi peut bien ressembler une ville mise sous cloche ?.
Sources documentaire : « Coronavirus : de la chauve-souris au déconfinement, la chronologie de la pandémie », Le Monde (12 mai 2020).